Les savoir-faire
Les 4èmes rencontres de Patrimoine(s) ont eu lieu le samedi 15 novembre 2003 au château de Brémontier-Merval dans le Pays de Bray. Le thème choisi était " les savoir-faire, comment les valoriser, comment les transmettre ? " Les débats ont été animés, souvent enthousiastes, avec les spécialistes du lin, du torchis, de la céramique, du verre, du bois…
C’est encore une fois le pluriel qui va décliner le thème de ces rencontres, avec une multiplicité de savoirs, de personnalités. Aujourd’hui, nous avons rassemblé en un lieu et un jour les artisans qui constituaient il n’y a pas si longtemps la communauté d’un village où tout était fabriqué sur place : le forgeron était cousin du charron, et du tonnelier, lui-même gendre du charpentier, neveu du potier marié à la fileuse, sœur du tisserand. Tous étaient nourris par le paysan et trouvaient sur place leur matière première.
Dans le riche pays de Bray, on a en effet tout "sous la main", ou "sous les pieds", pour reprendre l’expression des céramistes Juliette et Jacques Damville : qu’il s’agisse de l’argile, du bois de la forêt d’Eawy, du minerai de fer de Forges. Est-ce à dire pour autant qu’ici comme ailleurs, les artisans fonctionnaient en circuit fermé ? Oui, puisque l’objet, dont chacun est responsable, de l’ébauche à la finition, se troque ou se vend à la foire voisine. Non, parce qu’on échange ces savoir-faire qui, contrairement à des idées reçues, voyagent, font le tour de France, se partagent au sein des corporations, même s’ils se transmettent de père en fils, donnant tout son sens au mot " patrimoine ".
On est donc en droit de se poser la question : aujourd’hui, où l’objet anonyme de série, a pour seule identité la marque côtée en bourse, l’artisanat et ses savoir-faire ne sont-ils que de touchants archaïsmes ? Et ces rencontres le simple rappel nostalgique d’un passé où l’énergie était l’eau, le vent, le feu et la matière première la terre, le bois ?
Aujourd’hui comme hier, pourtant, les artisans sont toujours des techniciens et le mot "technique" est toujours l’un des sens du mot "art". Les "arts et métiers" qui vont nous être présentés ne sont donc ni passéistes, ni nostalgiques mais bien intégrés dans les réalités actuelles. Le torchis, tradition d’avenir, répond aux besoins nouveaux d’économie d’énergie en se comportant en véritable régulateur hydrométrique et le lin, après avoir été " lino " sait aussi se transformer en panneaux ou en robes d’été. A Blangy-sur-Bresle, les apprentis, les " gamins " ne travaillent plus le verre 12 heures par jour du lundi au samedi, mais ils peuvent recevoir puis transmettre à leur tour une tradition toujours vivace et il semblerait que ce devoir de transmission soit une autre des spécificités du pays d’Eu comme du Pays de Bray,. Aujourd’hui, on n’anoblit plus les maîtres-verriers, mais s’ils quittent d’eux-mêmes l’industrie pour la froideur d’un atelier fécampois, c’est sans doute que leur discipline est noble et enthousiasmante. C’est ce que nous expliquera monsieur Mac Kay tout à l’heure. Cela signifie une volonté forte de faire, de s’initier, de maîtriser pour initier à son tour. Il semblerait en effet que l’art appliqué devienne de plus en plus " un art impliqué "….
Vidéo réalisée par le Département de Seine-Maritime.
Le programme
Programme des 4èmes Rencontres du 15 novembre 2003
8h45 - Accueil des participants au château, puis mot d’accueil par Joël Masse, Proviseur du Lycée professionnel agricole du Pays de Bray / Ouverture par Martine Pastor, vice-présidente de l’association Patrimoine(s) :
Les savoir-faire : comment les valoriser ?
La terre : du cru au cuit
9h20 - Le torchis, matériau moderne, par Dominique Meslin, président de l’association des Artisans du torchis et Jérôme Brard, chargé de mission technique à la CAPEB de l’Eure.
9h40 - Démarche d’artistes-céramistes par Juliette et Jacques Damville.
10h - Le lin : de la culture à la haute-couture, une fibre naturelle, le lin en Haute-Normandie par André Rudi, organisateur du Festival du lin et de l’aiguille dans la vallée du Dun.
Exposition des photographies d’Hugo Miserey : les verriers de la Bresle et présentation du livre de Jean-Marc Montaigne, "Images du lin textile : " 8 000 ans, + 2 000 ans".
Le verre : du flacon au vitrail
10h50 - Savoir-faire perdus, savoir-faire retrouvés par Alain David, président de l’association du Manoir de Fontaine à Blangy-sur-Bresle.
11h10 - L’art du verre par Kevin Mac Kay, maître-verrier.
11h30 - Marie, tonnelier, film présenté par Agnès Deleforge, documentaliste au Pôle Image de Haute-Normandie.
Débat - Apéritif - Moment de convivialité avec présentation du Château par Joël Masse - Déjeuner.
Le bois : des fûts à la charpente
14h40 - Le métier des charpentiers par François Calame, conseiller pour l’ethnologie, DRAC Haute-Normandie/Ministère de la Culture.
15h - La conception de maquettes : l’exemple de l’Abbaye Saint-Georges-de-Boscherville par Daniel Duval, membre de l’ATAR.
Les savoir-faire : comment les transmettre ?
15h40 - Les métiers d’art des métaux, une formation à développer par Didier Lebas, chargé de mission à l’Institut de Formation et de Recherche pour les Artisanats des Métaux (IFRAM).
16h - Une expérience pédagogique : l’atelier patrimoine du lycée "Emulation dieppoise" par Philippe Cousin, formateur en serrurerie-métallerie, et Ginette Poullet, responsable du service éducatif du Musée de Dieppe.
Quelle(s) initiative(s) dans le domaine des "savoir-faire" ?
16h20 - Débat animé par Gérald Orange, président de l’association Patrimoine(s), avec la participation de :
Rose-Marie Decroix, conseiller en formation continue à la DAFCO ; Karine Hamel, chef de projet du Pôle régional du textile de l’Association de Promotion de la Cité des Matières ; Didier Lebas, chargé de mission "formation" à l’IFRAM.
17h15 - Les produits du terroir, un label de qualité visite commentée de la cidrerie par François Juguet, maître de chai.